28 janvier 2006

Conte Mongol : le chat-moine



Il était une fois, un chat qui avait volé un vénérable moine à maintes reprises. Un jour qu'il s'enfuyait avec un chapelet entre les dents, le moine le poursuivit, l'attrapa par la queue et la lui arracha. Ainsi troussé, le chat n'osa plus se montrer ni chasser; il perdit toutes ses forces et faillit mourir de faim. Mais il eut une idée : il pendit le chapelet à son cou et se posta près d'un passage très fréquenté. Une souris l'y aperçut, s'effraya et voulut se sauver, mais le chat lui adressa la parole :
«Mon enfant, sois sans crainte. Je suis un chat-moine, j'ai fait mes voeux et ne tuerai point. Dieu veuille que vous autres souris suiviez, comme moi, les chemins de la religion!».

La petite souris, très impressionnée par ces douces paroles, devint pieuse. Elle réunit un grand nombre de ses compagnes et leur transmit le message. Toutes venaient entourer le chat dévôt pour l'écouter. Alors, il leur dit:
«Maintenant, après avoir entendu le saint enseignement, faites cercle autour de moi et défilez l'une derrière l'autre, afin de me faire votre profession de foi, avant de rentrer chez vous.»

Ainsi, après chaque sermon, les souris s'en allaient en marchant à la queue leu-leu . Et le chat mangeait la dernière. Voyant diminuer leur nombre, un doute vint aux souris et elles délibérèrent. Le président de l'assemblée conclut :
«Allons examiner les crottes du chat!»
En y trouvant des os et des poils, les souris furent fixées : le chat les trompait. Au sermon suivant, on posa la question au chat : «Maître, de quoi vous nourrissez-vous?»
Le chat :
«Je me contente, mes frères et mes soeurs, de feuilles et d'herbes sèches.»
Le président réunit encore l'assemblée et décida :
«Procurez-vous une clochette avec un ruban, que vous trouverez dans la maison du voisin. Nous l'attacherons au cou du chat. Si, en le quittant, vous entendez le son de cette clochette, retournez-vous toutes pour voir ce qu'il fait!».

Au sermon suivant, le président dit au chat, en attachant la sonnette à son cou :
«Veuillez accepter, oh Maître, ce modeste bijou!»
Et quand les souris s'en allèrent à la queue leu-leu, comme d'habitude, elles entendirent soudain tinter la clochette, se retournèrent et virent le chat dévorer la dernière de la procession. Alors, le président s'écria :
«Le ventre du saint chat augmente au fur et à mesure que le nombre des souris diminue. Maître, comment se fait-il qu'on trouve des os et des poils dans vos crottes, si vous ne consommez que des feuilles et des herbes?»
Ainsi parla-t-il, et toutes les souris se sauvèrent chez elles pour ne plus jamais revenir. Le chat reconnut :
«J'ai été pris pour ne pas avoir recouvert mes crottes.»
À partir de ce jour, il ne manqua plus jamais de le faire, et voilà pourquoi tous les chats en font autant. Du moins, c'est ce que l'on dit.



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